Prévention

Cancers hématologiques

Mise à jour de l’article : 1-1-2016

Les cancers du sang (leucémies), de la moelle osseuse (myélome, macroglobulinémie), ou des ganglions (lymphomes) représentent aujourd’hui environ 5% de l’ensemble des cancers. Les causes de ces maladies ont été précisées. Il y a trois origines possibles à leur survenue :

– une origine virale (tel le virus HILV1 pour certaines leucémies aiguës, ou le virus EB pour certains lymphomes).

– une origine physique, liée aux irradiations, (certaines leucémies myéloïdes, certains lymphomes)

  • une origine chimique, (benzène, hydrocarbures, pesticides etc…) probablement pour un plus grand nombre d’entre elles (certaines leucémies, certains lymphomes, le myélome etc…).

Les progrès concernant les cancers hématologiques enregistrés depuis ces dernières années ont été les plus nets. L’hématologie, l’étude des maladies du sang, est une discipline médicale plus ancienne que la cancérologie. Les cancers hématologiques sont des  » tumeurs liquides « , c’est à dire des tumeurs dont les cellules circulent dans un liquide : le sang ou la lymphe. Ces tumeurs sont donc faciles d’accès pour la réalisation de différents tests de biologie moléculaire (prises de sang ou prélèvements ganglionnaires), et surtout elles sont particulièrement sensibles à la chimiothérapie et à la radiothérapie.

Ainsi, en cas de leucémie, de lymphome ou d’autres maladies hématologiques est-il nécessaire que vous soyez pris en charge dans un service d’hématologie compétent, tel qu’il en existe dans de nombreux Centre Hospitalo Universitaire (CHU).

Il y a deux types de leucémies aiguës, selon la nature des cellules sanguines concernées :

  1. les Leucémies Aiguës Lymphoblastiques (LAL) particulièrement fréquentes chez l’enfant (voir cancers de l’enfant), et
  2. les Leucémies Aiguës Myeloblastiques (LAM), particulièrement fréquentes chez l’adulte.

Les travaux du Pr. Dominique Belpomme sur ce type de leucémies ont conduit à proposer pour la première fois une classification pronostique internationale, basée sur des tests immunologiques, permettant de distinguer LAL de type T, des LAL de type B ou de type  » non T non B « . Cependant, compte tenu des progrès récemment réalisés dans le traitement de ces leucémies, cette classification est aujourd’hui moins utile pour fixer le pronostic, bien qu’elle garde tout son intérêt pour décider du type de protocole thérapeutique à utiliser. En effet le traitement de base consiste en la réalisation d’une chimiothérapie dont on distingue deux périodes :

  1. une première période d’induction, consistant à obtenir de façon rapide une régression complète de la maladie (normalisation du sang et de la moelle)
  2. une deuxième période consistant à maintenir et surtout à consolider la régression complète précédemment obtenue.

A cette chimiothérapie générale s’ajoute lors de cette deuxième phase, une chimiothérapie locale spécifique, instillée à l’aide d’une ponction lombaire, afin d’éviter la survenue de rechutes méningées.

Les progrès actuels concernent essentiellement cette deuxième période de maintenance et de consolidation. Aujourd’hui environ 80% des enfants atteints de LAL guérissent définitivement de leur maladie.

Les Leucémies Aiguës Myeloblastiques concernent essentiellement les adultes. Comme pour les LAL, le traitement de base repose sur la chimiothérapie, dont on distingue deux périodes : la première a pour objectif d’obtenir une régression complète de la maladie (normalisation du sang et de la moelle) et la seconde, celui de maintenir et de consolider cette régression.

Compte tenu de la moindre sensibilité des cellules myeloblastiques à la chimiothérapie, l’induction (première période) est souvent plus intense, et la consolidation (deuxième période) plus lourde. C’est la raison pour laquelle il est souvent utilisé lors de la seconde période, en secteur aseptique, des protocoles lourds de chimiothérapie, dont on cherche à atténuer certains effets par leur association à des autogreffes de moelle osseuse. Dans ce cas on prélève la moelle  » normale  » du malade dès l’obtention de la régression complète, pour la réinjecter au moment de l’administration des protocoles de chimiothérapie lourds, pendant la deuxième période de consolidation.

Il est donc évident que là aussi, de tels traitements ne peuvent être réalisés qu’en services hématologiques hautement spécialisés.

3.1. Leucémies chroniques

Les leucémies chroniques concernent essentiellement l’adulte. Il y a deux types de leucémies chroniques, selon la nature des cellules sanguines concernées :

  • les Leucémies Lymphoïdes Chroniques (LLC) et
  • les Leucémies Myéloïdes Chroniques (LMC).

3.2. Leucémies Lymphoïdes Chroniques (LLC)

Les Leucémies Lymphoïdes Chroniques (LLC) sont caractérisées par la présence de lymphocytes anormaux dans le sang. Elles surviennent essentiellement chez le sujet âgé. Tant que la leucémie est caractérisée par un faible nombre de lymphocytes dans le sang et qu’elle est bien tolérée cliniquement, aucun traitement particulier n’est à envisager. A l’inverse lorsque la leucémie progresse et devient plus importante, c’est à dire lorsque le nombre de lymphocytes augmente et que la maladie apparaît moins bien tolérée cliniquement, il importe de la traiter suffisamment tôt, avant que ne survienne un stade d’insuffisance médullaire (anémie, neutropénie, thrombopénie) difficilement réductible.

Une forme particulière de LLC, la leucémie à tricholeucocytes a bénéficié récemment de l’apport d’un médicament particulièrement efficace , la cladribine, puisque celle-ci permet d’obtenir la guérison des malades en quelques mois. Des progrès comparables concernent aujourd’hui les leucémies Myéloïdes Chroniques.

Les Leucémies Myéloïdes Chroniques sont caractérisées par la présence de cellules myéloïdes dans le sang et par une anomalie chromosomique fondamentale : la présence d’un chromosome surnuméraire particulier, appelé chromosome Philadelphie. Ces leucémies surviennent essentiellement chez les sujets après cinquante ans. Jusqu’à ces dernières années, la chimiothérapie utilisée, bien que permettant de contrôler la maladie pendant plusieurs années ne permettait pas d’éviter la transformation de cette leucémie chronique en leucémie aiguës, le plus souvent mortelle.

Dans un premier temps, des tentatives d’autogreffes médullaires, visant à regreffer les propres cellules du malade, prélevées en période chronique, ont semblé apporter quelques progrès. En fait, deux découvertes sont actuellement à considérer de façon primordiale :

  • la première, déjà ancienne, utilisant l’interferon alpha, permet d’obtenir des régressions complètes et même parfois des guérisons définitives,
  • la seconde, plus récente, utilisant le glivec, est encore plus efficace, puisque ce médicament permet d’obtenir un taux de guérison définitive encore plus élevé. Ainsi les LMC sont-elles maintenant devenues des maladies potentiellement guérissables dans de nombreux cas, à condition d’être correctement traitées en service spécialisé.

La maladie de Hodgkin est une tumeur des ganglions (lymphome), caractérisée par la présence de cellules lymphoïdes et myéloïdes particulières, constituant ce qu’il est convenu d’appeler le granulome hodgkinien, et par une cellule volumineuse, particulière appelée cellule de Steinberg.

Cette maladie touche principalement l’adulte jeune, bien qu’elle puisse survenir aussi chez l’enfant et la personne âgée. Le traitement de base repose sur la radiothérapie et la chimiothérapie qu’il convient d’administrer dans des conditions standardisées. C’est pour cette maladie que les progrès de la cancérologie ont été les plus remarquables : actuellement, tous stades compris, le taux de guérison atteint 75%, soit près de 100% pour les stades I et II et plus de 50% pour les stades III et IV. La fréquence de la maladie de Hodgkin est aujourd’hui moindre par rapport à ce qu’elle était il y a encore 20 ans et cette moindre fréquence semble être actuellement compensée par une fréquence croissante des lymphomes non Hodgkiniens.

Les lymphomes non-Hodgkiniens sont comme la maladie de Hodgkin des tumeurs des ganglions. Mais ces tumeurs, au lieu d’être caractérisées par la présence d’un granulome et des cellules de Steinberg, sont en réalité caractérisées par la présence de cellules lymphoïdes anormales directement issues de ganglions.

Elles ont été l’objet de nombreuses classifications internationales, la plus utilisée étant celle du Pr. Henri Rappoport. Celle-ci distingue du point de vue anatomo-pathologique, les formes modulaires et diffuses et du point de vue cellulaire, les formes lymphoblastiques, prolymphocytaires et lymphocytaires. Mais à coté des formes cellulaires devenues classiques, il faut aussi individualiser les lymphomes immunoblastiques, décrits pour la première fois par les Pr. G. Mathé et D.Belpomme. En outre, le Pr. D.Belpomme, en relation étroite avec le Pr. Rappoport, a proposé une classification immunologique de ces tumeurs ayant valeur pronostique.

Les lymphomes non-hodgkiniens sont d’origine diverse. Leur fréquence croissante serait principalement liée à la pollution chimique de notre environnement, en particulier au rôle cancérigène de certains pesticides. Mais une étiologie virale est aussi invoquée, notamment pour les lymphomes immunoblastiques survenant de façon particulière chez les sujets ayant bénéficié d’une transplantation rénale ou atteints de Sida. En effet, dans ces cas, la responsabilité du virus EB serait mise en cause.

Les lymphomes non-hodgkiniens ont par ailleurs certainement bénéficié des progrès de la chimiothérapie, et de combinaison appropriée à la radiothérapie. Ainsi, les stades I et II sont-ils presque toujours d’excellent pronostic, alors que les stades III ou IV nécessitent encore le bénéfice de nouveaux progrès.

Le myélome multiple (ou maladie de Kahler) et la Macroglobulinémie (ou maladie de Waldenström) sont deux affections rares du sujet âgé, caractérisées par la prolifération des plasmocytes et/ou des lymphocytes dans la moelle osseuse et leur capacité à envahir et lyser l’os.

Le myélome multiple ou Maladie de Kahler est caractérisée par l’apparition de lacunes osseuses, en particulier au crane et par la présence dans le sang, d’une quantité augmentée d’un même type d’immunoglobine : Ig G, Ig A ou Ig M.
Ce sont les plasmocytes qui sécrètent les immunoglobulines. La présence d’une quantité anormalement augmentée d’un même type d’immunoglobuline traduit donc l’origine monoclonale de la prolifération plasmocytaire et constitue la signature biologique du cancer. La classification de la maladie comprend 3 stades, selon son importance.

A ces trois stades, s’ajoute la possibilité d’insuffisance rénale, liée à la précipitation de l’immunoglobuline en quantité anormale dans le rein. Reprenant des travaux américains, le Pr. D.Belpomme a confirmé la valeur pronostique de cette classification. En outre, il a pu montrer que le traitement de la maladie devait être modulé en fonction du stade de la maladie. Classiquement un tel traitement repose essentiellement sur les corticoïdes et la chimiothérapie, qu’il convient de compléter par la radiothérapie en cas de localisations osseuses douloureuses.

Mais deux découvertes récentes semblent avoir profondément modifié le pronostic de la maladie :

  1. la première, déjà ancienne, consiste à utiliser, en cas de résistance à la chimiothérapie classique, l’administration en secteur aseptique, de protocoles de chimiothérapie plus lourds, sous couvert d’une autogreffe de moelle osseuse (la propre moelle du malade est prélevée en zone osseuse non atteinte, et lui est réinjectée après administration du protocole lourd).
  2. la seconde, plus récente, consiste à utiliser, le thalidomide, en cas de résistance à la chimiothérapie classique. L’utilisation d’un tel traitement non cytotoxique répond aux objectifs de recherche actuels de l’ARTAC. Une équipe anglaise a démontré pour la première fois l’efficacité du Thalidomide qui a été confirmée aujourd’hui l’ARTAC. En effet, le thalidomide, bien que non cytotoxique, se révèle être capable d’abaisser le taux d’immunoglobuline anormal dans le sang et d’augmenter très nettement l’espérance de vie des malades, même lorsque la maladie est devenue résistante aux traitements classiques.

La macroglobulinémie ou maladie de Waldenström est une affection proche de la maladie de Kähler. Elle s’en distingue néanmoins par sa moindre fréquence, par le fait que l’immunoglobuline en quantité anormalement augmentée est toujours une IGM et par le fait que la prolifération cellulaire ne concerne pas comme pour le myélome, principalement les plasmocytes, mais les lymphocytes.

En outre, compte tenu du fait que l’IGM est une macroglobuline (c’est à dire une protéine de très grand poids moléculaire), la maladie se traduit essentiellement par une très importante augmentation de la masse sanguine (le volume du sang). L’IGM ayant un poids moléculaire très élevé et présente en quantité anormale dans le sang, elle y retient une grande quantité d’eau. Le traitement de la maladie consiste dans un premier temps, à soustraire du sang l’immunoglobuline IGM et l’eau qu’elle retient, par la pratique de plasmaphérèses (on retire des grands quantités de plasma) et dans un deuxième temps, à traiter la prolifération lymphoïde par chimiothérapie. Une telle chimiothérapie devra être maniée avec prudence, compte tenu de l’âge souvent avancé des malades atteints de cette maladie. C’est souligner là aussi la nécessité d’une prise en charge en service spécialisé.