Prévention environnementale

L’ARTAC est une association indépendante de médecins et de chercheurs, spécialisée dans l’étude biologique, thérapeutique et clinique des cancers.

L’ARTAC est la seule association française de lutte contre le cancer à promouvoir une prévention environnementale. Son caractère scientifique a permis à l’ARTAC d’être reconnue d’intérêt général. Fondée en 1984 par le Pr. Dominique Belpomme, elle place au cœur de son intérêt la guérison des malades ainsi que la protection des femmes enceintes et des enfants.

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L’Origine environnementale des cancers

Le constat de base est l’augmentation d’incidence des cancers depuis l’après-guerre mondiale et plus particulièrement depuis ces 25 dernières années. Comme l’indique le tableau ci-dessous, aujourd’hui, dans notre pays, le tabagisme est à l’origine d’environ 25% des cancers. Les trois quart des cancers qui n’y sont pas liés, sont donc concernés par d’autres facteurs. Nous exposons ci-après douze arguments scientifiques qui permettent de concevoir que ces facteurs relèvent non pas seulement du mode de vie, mais de la pollution.

1er argument : le tabagisme et l’alcoolisme sont en régression

Il n’est pas possible d’incriminer le tabagisme ni l’alcoolisme à l’origine de l’augmentation d’incidence des cancers, puisque ces deux facteurs sont en régression depuis ces trente dernières années en France. De plus, les cancers que ces deux facteurs de risque induisent lorsqu’ils sont associés l’un à l’autre (cancers ORL et de l’œsophage) ont une incidence et une mortalité qui diminuent (voir figure 1 ci-après).
En outre, dans les pays tels que la Grande-Bretagne où la lutte contre le tabagisme a débuté bien avant celle mise en œuvre en France, l’incidence des cancers y est globalement encore croissante (voir figure 2 qui suit). Ce qui indique clairement que la lutte contre le tabagisme ne pourra jamais parvenir à elle seule à enrayer le fléau.
L’ensemble de ces résultats ont été rapportés, discutés et publiés en 2007 par l’ARTAC dans les articles suivants:
Irigaray P., Newby J.A., Clapp R., Hardell L., Howard V., Montagnier L., Epstein S.S., Belpomme D. Lifestyle-related factors and environmental agents causing cancer: An overview. Biomed Pharmacother. 2007 Dec;61(10):640-658.
Belpomme D., Irigaray P., Newby J.A., Howard V., Clapp R., Sasco A.J., Hardell L. The growing incidence of cancer: role of lifestyle and screening detection. Int J Oncol. 2007, 30, 1037-1049.

Figure 1. Evolution de la mortalité pour les trois types de cancers objets de prévention en France

Figure 2. L’incidence des cancers dans le monde :

L’Origine environnementale des cancers

Le constat de base est l’augmentation d’incidence des cancers depuis l’après-guerre mondiale et plus particulièrement depuis ces 25 dernières années. Comme l’indique le tableau ci-dessous, aujourd’hui, dans notre pays, le tabagisme est à l’origine d’environ 25% des cancers. Les trois quart des cancers qui n’y sont pas liés, sont donc concernés par d’autres facteurs. Nous exposons ci-après douze arguments scientifiques qui permettent de concevoir que ces facteurs relèvent non pas seulement du mode de vie, mais de la pollution.

1er argument : le tabagisme et l’alcoolisme sont en régression

Il n’est pas possible d’incriminer le tabagisme ni l’alcoolisme à l’origine de l’augmentation d’incidence des cancers, puisque ces deux facteurs sont en régression depuis ces trente dernières années en France. De plus, les cancers que ces deux facteurs de risque induisent lorsqu’ils sont associés l’un à l’autre (cancers ORL et de l’œsophage) ont une incidence et une mortalité qui diminuent (voir figure 1 ci-après).
En outre, dans les pays tels que la Grande-Bretagne où la lutte contre le tabagisme a débuté bien avant celle mise en œuvre en France, l’incidence des cancers y est globalement encore croissante (voir figure 2 qui suit). Ce qui indique clairement que la lutte contre le tabagisme ne pourra jamais parvenir à elle seule à enrayer le fléau.
L’ensemble de ces résultats ont été rapportés, discutés et publiés en 2007 par l’ARTAC dans les articles suivants:
Irigaray P., Newby J.A., Clapp R., Hardell L., Howard V., Montagnier L., Epstein S.S., Belpomme D. Lifestyle-related factors and environmental agents causing cancer: An overview. Biomed Pharmacother. 2007 Dec;61(10):640-658.
Belpomme D., Irigaray P., Newby J.A., Howard V., Clapp R., Sasco A.J., Hardell L. The growing incidence of cancer: role of lifestyle and screening detection. Int J Oncol. 2007, 30, 1037-1049.

Figure 1. Evolution de la mortalité pour les trois types de cancers objets de prévention en France

Figure 2. L’incidence des cancers dans le monde :

2ème argument : l’incidence croissante des cancers concerne des cancers non liés au seulement partiellement en mode de vie.

L’augmentation d’incidence concerne des cancers non liés ou seulement partiellement liés aux facteurs du mode de vie*.
Leucémies, lymphomes, tumeurs cérébrales, cancers du testicule et cancers de l’enfant ne sont causés directement par aucun des principaux facteurs classiques de risque relevant du mode de vie.

  • Cancers du rein et de la vessie : ils sont certes liés en partie au tabagisme, mais il a été prouvé que d’autres facteurs d’origine chimique interviennent.
  • Cancers du sein chez la femme : ils ont doublé en taux d’incidence depuis ces 20 dernières années. Comme le montre une étude américaine, leur origine n’est partiellement expliquée que dans un cas sur deux par la possibilité de facteurs liés au mode de vie (âge plus tardif de la première grossesse, baisse de la natalité, prise de pilule ou de traitements substitutifs à la ménopause, etc.). Voir Figure 1.
  • Cancers de la prostate : ils ont triplé en taux d’incidence depuis ces 20 dernières années. Leur origine n’est partiellement expliquée que dans moins d’un cas sur trois. Voir Figure 1

*Les facteurs de risque liés au mode de vie sont, en dehors du tabagisme : l’alcoolisme, les déséquilibres de régime alimentaire (trop de graisses animales au détriment des fruits et légumes), surpoids, obésité, sédentarité, prise d’hormones (contraception, traitements substitutifs de la ménopause), stress, etc.

Figure 1. Incidence des cancers du sein et de la prostate en Norvège
(Données sources : Institute of Population – based Cancer Research. Cancer in Norway 2000, Cancer registry of Norway 2002)

3ème argument : l’amélioration des techniques de dépistage n’est pas seule en cause

Pour expliquer l’augmentation d’incidence des cancers du sein et de la prostate, le rôle du dépistage a été évoqué, étant donné la mise au point depuis ces 20 dernières années de tests spécifiques (mammographies et échographies mammaires pour les cancers du sein, dosage des PSA pour les cancers de la prostate). En réalité, cette interprétation n’est que partiellement fondée. Même si on peut admettre le rôle majorant du dépistage pour expliquer l’incidence croissante de ces cancers, il ne peut rendre compte de l’amplitude des chiffres observés.
Pour les cancers du sein, on pourrait alléguer que la mise en œuvre depuis ces dernières années d’un programme systématique de dépistage, ait pu contribuer à majorer artificiellement les chiffres d’incidence. En réalité, il n’en est rien, car jusqu’à ce jour, les résultats obtenus par la mise en œuvre de ce programme sont plutôt décevants. En moyenne 40 à 45% des femmes entrant dans ce programme ont répondu positivement à leur convocation. Ce qui signifie en clair que le rendement d’un tel dépistage est minime, puisque pour être efficace en terme de santé publique, il faudrait que le taux de participation des femmes soit d’au moins 70 %.
En outre, dans les pays disposant de registres précis de morbidité établis depuis de nombreuses années, qui, hélas, manquent dans notre pays, il est clair que l’augmentation d’incidence des cancers du sein et de la prostate est survenue avant même la mise en œuvre des tests de dépistage (voir la Figure 1).

De plus, à condition qu’il concerne de vrais cancers, c’est-à-dire des cancers « invasifs », les tests de dépistage ne font que conforter « en avance » un diagnostic clinique. C’est ce que les épidémiologistes appellent l’ « avance du diagnostic ». Dire que grâce à ces examens on aurait accru artificiellement la fréquence de détection de tels cancers, revient à dire que si on ne les avait pas dépistés, ils ne seraient pas apparus : cela témoigne d’un complet mépris des concepts fondamentaux de la cancérologie, car cela signifierait qu’on peut guérir spontanément d’un cancer. Le non sens précédent est particulièrement vrai pour les tumeurs
cérébrales (voir la Figure 2). Détectée ou non, une tumeur cérébrale se manifeste toujours cliniquement un jour ou l’autre.

En réalité, un tel concept peut-être appliqué à la plupart des autres cancers qu’on dépiste aujourd’hui. On peut certes admettre qu’un certain nombre de cancers progressant très lentement, et donc demeurant longtemps asymptomatiques tels certains cancers de la prostate ou du corps thyroïdien, ne se seraient jamais manifestés du vivant du malade, et donc viennent aujourd’hui grossir artificiellement les chiffres de morbidité, mais il n’en est pas de même pour la plupart des autres cancers. En règle générale, tout cancer dépisté se serait manifesté obligatoirement un jour ou l’autre, cliniquement. A condition bien sûr que les cancers dépistés soient de réels cancers, c’est à dire des tumeurs invasives ayant déjà infiltré les tissus normaux. Or c’est bien le cas de tous les cancers qu’on comptabilise aujourd’hui dans les statistiques établies sur les 25 dernières années dans notre pays, y compris les cancers du sein et de la prostate, puisque lorsqu’une tumeur présumée cancéreuse est dépistée ou diagnostiquée, on en confirme toujours la nature invasive par la réalisation de biopsies.

Il faut savoir que le véritable intérêt du dépistage des cancers est non pas qu’on en augmente artificiellement l’incidence (la morbidité), mais qu’on en diminue concrètement la mortalité, car en général, plus tôt un cancer est décelé et donc traité, meilleur en est le pronostic. Ainsi, l’argument selon lequel l’augmentation actuelle d’incidence des cancers du sein, de la prostate ou du corps thyroïdien serait artificielle, liée à l’introduction de nouvelles méthodes de dépistage revient purement et simplement à nier l’intérêt du dépistage en terme de santé publique.

Figure 1. Incidence des cancers du sein et de la prostate en Norvège (Données sources : Institute of Population – based Cancer Research. Cancer in Norway 2000, Cancer registry of Norway 2002)

Figure 2. Evolution de la mortalité par tumeur cérébrale en France (Données sources : INED) :

Pour en savoir plus :
Irigaray P., Newby J.A., Clapp R., Hardell L., Howard V., Montagnier L., Epstein S.S., Belpomme D. Lifestyle-related factors and environmental agents causing cancer: An overview. Biomed Pharmacother. 2007 Dec;61(10):640-658.
Belpomme D., Irigaray P., Newby J.A., Howard V., Clapp R., Sasco A.J., Hardell L. The growing incidence of cancer: role of lifestyle and screening detection. Int J Oncol. 2007, 30, 1037-1049.

4ème argument : le vieillissement n’est pas en cause, mais la durée d’exposition aux facteurs de risque environnementaux

On entend souvent dire que l’actuelle augmentation d’incidence des cancers serait liée à l’augmentation de l’espérance de vie. Vivant plus vieux, la probabilité de faire un cancer serait plus élevée. L’argument repose sur l’idée que les cellules de l’organisme, en vieillissant, seraient plus enclines à muter spontanément et donc à devenir cancéreuses. L’argument est là aussi totalement injustifié du point de vue scientifique, pour plusieurs raisons :

Des cancers en augmentation chez l’enfant et les sujets jeunes

Actuellement, l’augmentation de fréquence des cancers concerne toutes les tranches d’âge, donc les enfants et les sujets jeunes. En particulier, les cancers du sein concernent des femmes de plus en plus jeunes (avant 40 ans) et les cancers de la prostate des hommes de plus en plus jeunes (avant 50 ans).

Une probabilité de mutation plus élevée chez les sujets jeunes

Au plan biologique, pour qu’une cellule mute, il faut qu’elle se divise. Or c’est lors de la grossesse, chez l’enfant très jeune, et lors de la puberté que le nombre de cellules capables de se diviser – ce qu’on appelle les « cellules souches tissulaires » – est le plus important et que la fréquence des divisions y est la plus élevée. Il en résulte que c’est chez le foetus, l’enfant et l’adolescent que la probabilité des cellules à muter est la plus élevée. Chez le sujet âgé, il peut y avoir à la fois une production spontanée plus importante de radicaux libres mutagènes et une altération de la réparation de l’ADN liée au vieillissement et donc une possibilité de muter élevée, mais en réalité les deux phénomènes probabilistes, le premier lié aux capacités réduites de division des cellules souches, le second à leur
vieillissement, tendent chez les sujets âgés à se compenser mutuellement. Ceci explique que la probabilité de muter est sans doute plus élevée chez les sujets jeunes que chez les sujets âgés.

Une augmentation du nombre de mutations liée à la durée d’exposition aux facteurs environnementaux

Si on ne peut nier que le nombre de cancers augmente avec l’âge, une autre hypothèse non liée au vieillissement cellulaire biologique mais liée à la survenue de mutations provoquées doit être considérée, en vertu des lois de la cancérogenèse : pour qu’un cancer survienne, l’accumulation d’un nombre critique de mutations (2 chez l’enfant, 3 à 6 chez l’adulte) dans une cellule est nécessaire, ce qui signifie que plus la durée d’exposition aux facteurs de risque environnementaux est longue et plus la probabilité d’avoir obtenu ce nombre critique est élevée. Ainsi plus on est âgé et plus la probabilité de faire un cancer augmente.
Contrairement à l’opinion médicale courante, ce n’est probablement pas le vieillissement biologique qui intervient de façon prédominante, mais la durée d’exposition aux facteurs de risque.

5ème argument : le foetus et le jeune enfant sont très vulnérables aux facteurs environnementaux

Le fœtus et le jeune enfant sont très vulnérables aux facteurs environnementaux cancérigènes. La raison en est que leurs cellules se divisent très rapidement et que leurs mécanismes de défense, notamment de détoxification des substances chimiques étant immatures, de très nombreuses substances chimiques se stockent dans leurs organisme.
Des études récentes ont en effet montré que les nouveaux-nés sont aujourd’hui contaminés par de très nombreuses substances CMR, c’est à dire cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques, ce qui constitue une véritable «bombe sanitaire à retardement». En raison du risque de survenue de cancers et d’infertilité, les modèles expérimentaux permettent de concevoir que pour certains cancers, la première étape a lieu dès la grossesse, in utero.

6ème argument : la susceptibilité génétique favorise le rôle des facteurs  environnementaux

L’implication des facteurs génétiques dans la genèse des cancers est souvent mal comprise.
Elle doit être envisagée à deux niveaux :

  • d’une part, au niveau des cellules sexuelles, porteuses des gènes héréditaires, qui, lorsque certains d’entre eux sont mutés transmettent aux descendants, une ou plusieurs mutations les rendant susceptibles au cancer.
  • d’autre part, au niveau des cellules somatiques, celles de notre corps, porteuses de gènes qu’on appelle « polymorphes », également de transmission héréditaire, mais qui, sans qu’ils soient mutés permettent à notre organisme d’exprimer des caractères qui nous distinguent les uns des autres, et en particulier qui nous rendent plus ou moins susceptibles à faire un cancer, selon que nous avons ou non la capacité d’activer les facteurs cancérigènes présents dans l’environnement.

Or il y a ici, à chacun de ces deux niveaux, des données statistiques à considérer. On admet que seulement 1 à 5% environ des cancers sont héréditaires, ce qui est très peu, alors qu’environ 30% d’entre nous possèdent des «traits génétiques» de polymorphisme rendant notre organisme plus susceptible que chez les autres à activer les facteurs cancérigènes de l’environnement et donc à faire un cancer.
Pour expliquer l’augmentation d’incidence des cancers, on pourrait donc a priori penser que dans la population actuelle, la proportion d’individus présentant une susceptibilité à faire un cancer, a augmenté.

Deux observations : il est impossible qu’en une génération (25 ans), il y ait eu un tel accroissement en nombre de sujets présentant une susceptibilité génétique au cancer, pour des raisons théoriques de simple démographie et de ségrégation génique. Enfin, même si tel était le cas, la deuxième observation est que cet accroissement de susceptibilité génétique aux cancers ne ferait que conforter la thèse de leur origine environnementale.

7ème argument : les facteurs de risque liés au mode de vie ne font que favoriser la cancérisation des cellules par ces cancérigènes environnementaux

Les facteurs de risque liés au mode de vie ne font que favoriser la cancérisation des cellules par des cancérigènes environnementaux. Il est essentiel de distinguer les facteurs de risque tels que les analysent les recherches en épidémiologie, des causes véritables des cancers telles que les analysent les recherches en toxicologie et en biologie. Les facteurs de risque liés à notre mode de vie ne sont que des facteurs favorisant l’action des cancérigènes environnementaux (virus, rayons, substances chimiques).

Trois exemples :

  1. L’exposition solaire augmente la quantité d’ultraviolets parvenant à la peau. L’exposition solaire est le facteur de risque. Mais la cause véritable des cancers de la peau sont les ultraviolets.
  2. De même la survenue de cancers du col de l’utérus peut être lié à des relations sexuelles impliquant des partenaires différents – c’est le facteur de risque – , mais la véritable cause de ces cancers sont les Papilloma virus, transmis au cours des relations sexuelles.
  3. Enfin, même le tabagisme (qu’il soit actif ou passif) ne favorise l’apparition de certains cancers que parce que la fumée et les goudrons de la combustion du tabac contiennent de très nombreuses substances cancérigènes

Il y a donc très souvent un abus de présentation, y compris par des scientifiques, lorsqu’on mélange les facteurs de risque avec les véritables causes des cancers. C’est la raison pour laquelle les disciplines de recherche visant à mettre en évidence les causes des cancers – l’épidémiologie, la toxicologie et la biologie –, plutôt que de s’affronter doivent plutôt travailler en complémentarité.
L’épidémiologiste a le mérite de mettre en évidence l’existence de facteurs de risque, sur le terrain, c’est à dire au sein des populations, mais les facteurs de risque sont rarement de véritables facteurs à l’origine de ces cancers. En outre, le lien mis en évidence est associatif, non causal.
Le toxicologue a par contre le mérite de mettre en évidence l’existence d’un lien causal, de cause à effet. Mais cette mise en évidence étant réalisée en laboratoire, les résultats sont difficiles à interpréter. La toxicologie seule ne peut donc pas apporter la preuve de ce lien dans la population, si elle n’est pas éclairée par l’épidémiologie et réciproquement.

Quant à la biologie, elle permet d’éclairer la toxicologie.
Les trois disciplines sont complémentaires. Réduire les recherches à l’une d’entre elle, ne peut conduire à une évaluation précise de la réalité.
Pour en savoir plus : lire « Guérir du Cancer ou s’en protéger » et « Avant qu’il ne soit trop tard« .

8ème argument : hormis le tabagisme, la plupart des facteurs de risque liés au mode de vie ne sont pas mutagènes

Hormis le tabagisme qui favorise le contact de l’organisme avec des carcinogènes chimiques, aucun des facteurs classiques liés au mode de vie n’est en lui-même mutagène. Puisqu’il ne peut y avoir de cancer sans mutation, les véritables facteurs mutagènes ne peuvent être que dans l’environnement. Il s’agit là d’un constat qui, bien qu’il soit scientifiquement évident, a été totalement occulté jusqu’à ce jour. D’un côté les organismes de recherche internationaux colligent dans des listes, un nombre croissant de facteurs physiques, chimiques ou biologiques, « certainement », « probablement » ou « possiblement » à l’origine des cancers, et de
l’autre, certains chercheurs et institutions clament sans discontinuer que les causes des cancers sont liées à notre mode de vie sans prendre en compte la pollution
environnementale actuelle en tant que facteur de risque à l’origine de très nombreux cancers.
Ce paradoxe doit être dépassé par l’analyse critique des différents facteurs de notre mode de vie.
Pour le tabagisme, de nombreux mutagènes existent dans la fumée et les goudrons de tabac, dont principalement des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), et des nitrosamines qui résultent de sa combustion. Ainsi le tabagisme est indéniablement un facteur essentiel, à l’origine d’environ 25% des cancers. Par conséquent, la lutte contre le tabagisme est impérative. Mais pour les trois quarts des cancers restants, aucun facteur lié au mode de vie est prouvé être en lui-même mutagène :

L’alcoolisme
L’alcool éthylique n’est en lui-même pas cancérigène et donc à l’évidence pas mutagène. Mais alors comment agit-il ?

La réponse à cette question est à la fois claire et indéterminée. Claire, car on sait que l’alcool est un «cocarcinogène», c’est à dire que bien que non cancérigène, il agit en favorisant l’action des cancérigènes et en particulier celle des mutagènes. Ainsi l’association tabagisme + alcoolisme est-elle potentialisante, autrement dit augmente la probabilité de faire un cancer. C’est ce qui est observé en pratique : si un fumeur ne fait que fumer, il multiplie par 3 le risque de faire un cancer ORL, mais si en outre il s’adonne de façon chronique à l’alcool, en fonction des doses de tabac inhalées et d’alcool absorbées, il la multiplie par 6 ou par 9 !
Cette observation est prouvée au plan épidémiologique et aujourd’hui confirmée par la preuve inverse, puisque dans notre pays, la diminution conjointe du tabagisme et de l’alcoolisme depuis ces 20 à 30 dernières années a eu pour résultat la diminution de mortalité des cancers ORL et de l’oesophage.

Comment l’alcool agit-il, en d’autres termes, comment potentialise-il les effets cancérigènes du tabac? C’est là que se pose la question du mécanisme d’action de l’alcool et que la réponse est difficile, car on ne sait pas précisément comment il agit. Pourtant un élément de réponse apparaît de plus en plus probable: l’alcool augmente l’effet mutagène de la fumée et des goudrons de tabac, en agissant directement au contact de la bouche, du pharynx et de l’œsophage, l’une des hypothèses étant qu’en dilatant les vaisseaux des muqueuses avec lesquelles il entre en contact, il en augmente la pénétrance dans l’organisme et donc celle des HAP ou nitrosamines mutagènes qui résultent de sa combustion.

Pilule et traitements hormonaux substitutifs

Autre facteur lié à notre mode de vie: la prise prolongée de pilule contraceptive et de traitements hormonaux substitutifs pour juguler les perturbations symptomatiques de la ménopause.
Beaucoup a été dit à ce sujet, sans rigueur scientifique véritable, en raison de considérations sociétales diverses et le corps médical a ici sa part de responsabilité. Il est indéniable que la pilule est cancérigène, et qu’elle l’est même sous forme minidosée, mais le risque individuel de cancer est faible. L’OMS et plus particulièrement le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC), l’a classée comme « certainement cancérigène », car elle augmente le risque de cancers du sein, bien que le risque individuel soit faible et concerne seulement une catégorie de femmes, celles qui prennent sans discontinuer la pilule avant leur première grossesse.
La question qui nous concerne ici est de savoir par quel mécanisme la pilule induit ses effets cancérigènes. La réponse est tout à fait claire. A petite dose, elle agit en tant que promoteur, non comme mutagène, c’est à dire qu’elle stimule la division des cellules glandulaires du sein qui ont déjà muté, quelle qu’en soit la raison. Il en est de même des traitements hormonaux substitutifs de la ménopause, dont l’effet cancérigène est confirmé, à partir de trois études internationales ayant prouvé qu’ils augmentent le risque de cancers du sein. Le mécanisme est le même: à petite dose, ces traitements ne sont pas mutagènes. Ils agissent en tant que
promoteurs et le risque de cancers est d’autant plus grand, qu’ils sont administrés de façon prolongée.
A noter qu’une étude épidémiologique récente a montré que depuis la diminution de prise des traitements hormonaux substitutifs dans notre pays, le nombre de cancers du sein avait régressé chez les femmes ménopausées.

Le stress

Celui-ci peut avoir un rôle indirect, en favorisant le tabagisme ou l’alcoolisme. En outre, si on admet qu’il puisse avoir un rôle direct, celui-ci ne pourrait intervenir que lors de la phase de promotion. Car en aucun cas le stress ne peut avoir un effet mutagène. Tout au plus pourraitil donc intervenir en stimulant la multiplication de cellules ayant déjà muté par le biais de l’induction d’un déficit immunitaire ou de la sécrétion de facteurs de croissance endogènes.

Sédentarité – surpoids – obésité

Il s’agit là d’un nouveau concept, qui voudrait faire accréditer l’idée selon laquelle l’apparition de certains cancers est liée à la sédentarité, au surpoids ou à l’obésité.
Il est clair qu’aujourd’hui on reste trop souvent assis derrière un écran d’ordinateur ou de télévision, qu’on ne fait pas suffisamment de sport et qu’on circule plus souvent en voiture qu’à pied ou en vélo. L’argument ne cadre pas avec l’observation clinique des malades que les cancérologues soignent, car actuellement dans notre pays, très peu de malades atteints de cancer sont en surpoids. De plus, le surpoids ou l’obésité sont incapables d’induire des mutations et ne pourraient agir que sur la promotion. Et même dans ce cas, les mécanismes sont loin d’être clairs, du point de vue biologique. Tout au plus sont-ils des hypothèses. Par contre, le point essentiel est que le surpoids et l’obésité peuvent être induits par certains polluants chimiques tels que le benzo[a]pyrène et que comme l’ont montré les travaux de
l’ARTAC, le tissu adipeux se comporte lui-même comme un réservoir pour les polluants chimiques.

Les déséquilibres de régime alimentaire

Reste le problème essentiel du régime alimentaire qui, lorsqu’il est très déséquilibré, peut être à l’origine de surpoids et d’obésité.
Il est vrai que nos habitudes alimentaires ont considérablement changé depuis ces dernières années et que dans nos pays riches, on mange trop, en particulier trop de graisses animales et pas assez de fruits et de légumes. Il est classiquement admis, à partir d’études réalisées chez l’animal, que manger trop de graisses animales favoriserait la survenue d’un cancer du sein, de la prostate ou du gros intestin.

En réalité, l’analyse de l’ensemble des données épidémiologiques actuellement disponibles ne confirme pas ce fait. Les résultats des études sont contradictoires, à tel point que selon Mitra Saadatian du CIRC, rien n’est prouvé dans ce domaine. En outre, les graisses animales, si tant est qu’on en confirmerait leur rôle cancérigène chez l’homme, agiraient en réalité aussi par un rôle promoteur. Il n’est donc aujourd’hui pas scientifiquement prouvé que les déséquilibres de régime alimentaire puissent être en eux-mêmes à l’origine de mutations. Les études réalisées sont biaisées par le fait que le plus souvent les régimes riches en graisses animales, s’accompagnent simultanément d’une consommation insuffisante en fruits et légumes dont on a par ailleurs semble-t-il démontré un certain rôle protecteur antimutagène en raison de la présence d’antioxydants. Mais cet effet protecteur est certainement plus faible qu’on ne le pensait puisqu’il ne concernerait au mieux que 5% des cancers.

Ainsi, fondamentalement, il apparaît que ce ne sont pas les graisses animales elles-mêmes qui pourraient être à l’origine de l’augmentation d’incidence des cancers, mais plutôt les polluants lipophiles, liposolubles mutagènes qu’elles contiendraient. Les données actuelles apportent une preuve indirecte de l’existence de facteurs mutagènes dans l’alimentation, qu’il s’agisse de contaminants ou d’additifs.

En conclusion, hormis le tabagisme, il n’est aujourd’hui pas prouvé que les facteurs liés au mode de vie soient mutagènes. Donc, étant donné qu’il ne peut y avoir de cancer sans mutation, les facteurs mutagènes sont à rechercher ailleurs, soit, en dehors du tabagisme,
dans l’environnement physique, chimique et biologique.

Pour en savoir plus :
Irigaray P., Newby J.A., Clapp R., Hardell L., Howard V., Montagnier L., Epstein S.S., Belpomme D. Lifestyle-related factors and environmental agents causing cancer: An overview. Biomed Pharmacother. 2007 Dec;61(10):640-658.
Irigaray P., Newby J.A., Lacomme S., BelpommeD. Overweight/obesity and cancer genesis : More than a biological link. Biomed Pharmacother. 2007 Dec;61(10):665-678.

9ème argument : le rôle protecteur des fruits et légumes ne concerne que 5% des cancers

De très nombreuses études épidémiologiques ont accrédité l’idée selon laquelle manger chaque jour des fruits et légumes variés et en quantité suffisante diminue le risque de survenue de certains cancers. C’est notamment ce qu’ont montré les études relevant du projet européen EPIC (European Projective Investigation Into Cancer and nutrition) et ce qu’indique le réseau français de recherche en alimentation NACRe (Réseau national alimentation recherche cancer). La protection concernerait des cancers digestifs, tels que les cancers de l’œsophage et de l’estomac, mais aussi plusieurs autres, tels que les cancers de la bouche, du pharynx et du poumon, et probablement aussi, les cancers du larynx, du gros intestin, du pancréas et de la vessie. Cette protection serait donc à large spectre et ne concernerait pas les cancers liés au tabagisme.

L’une des explications avancées est l’existence dans les fruits et légumes de fibres végétales, qui à l’exception de la lignine, sont composées essentiellement de polysaccharides (des sucres complexes). Les polysaccharides comprennent la cellulose et l’hémicellulose. La cellulose est comme la lignine, insoluble dans l’eau, mais la retient. Elle participe donc au transit intestinal en structurant les matières fécales. Comme la cellulose, certaines hemicelluloses sont insolubles dans l’eau. Mais la plupart sont à l’inverse hydrosolubles, de même que les pectines et les gommes, et donc augmentent la viscosité des selles. L’effet principal des fibres végétales serait donc d’ordre mécanique. En ralentissant la vidange gastrique et surtout en diminuant l’absorption intestinale des facteurs cancérigènes présents dans le bol alimentaire, elles éviteraient leurs contacts avec la muqueuse intestinale. Mais cette explication est purement théorique.

Le rôle mécanique protecteur des fibres végétales est-il seul en cause ? Il y a une deuxième explication possible à l’effet protecteur des fruits et légumes : l’existence d’anti-oxydants naturels dans les fruits et légumes sous la forme de vitamines A, E ou C, d’oligoéléments (zinc, sélénium) de glucosinolates, de caroténoïdes et de polyphénols qui comprennent plus particulièrement des phytooestrogènes.

Or toutes ces substances naturelles ont pour propriété d’être des antioxydants, c’est-à-dire des pièges à radicaux libres, leur permettant de s’opposer à l’effet mutagène d’éventuels polluants alimentaires ou respiratoires en les inactivant. En outre, les phytooestrogènes après absorption intestinale, inhiberaient la promotion ou la progression tumorale de petits cancers ou précancers déjà néoformés. Ces substances ont certes une structure chimique similaire aux oestrogènes, mais en diffèreraient donc par leurs propriétés. En effet, si les oestrogènes sont un facteur de croissance des cellules cancéreuses qui possèdent des récepteurs à oestrogènes, à l’inverse les phytooestrogènes éviteraient l’apparition des cancers, en s’opposant à l’effet mutagène ou promoteur des contaminants ou additifs alimentaires, à condition de les ingérer à titre préventif. Tel est le cas des flavonoïdes, dont quatre catégories ont été individualisées : les isoflavones, coumestames, stilbènes et lignines qu’on trouve en grande quantité dans certains fruits et légumes. Bien que la règle édictée par l’OMS et en particulier par «l’Europe contre le cancer» de manger des fruits et légumes pour éviter de faire un cancer doit toujours être considérée, la protection ainsi générée apparaît être faible. Elle ne concernerait que 5% de l’ensemble des cancers.

10ème argument : virus, rayonnements, produits chimiques : la multitude des facteurs cancérigènes ou cocarcinogènes présents dans l’environnement

Il y a trois catégories de facteurs environnementaux à l’origine des cancers : les virus, les rayonnements et les produits chimiques. Or, depuis la dernière guerre nous avons considérablement pollué ou contribué à polluer notre environnement par ces facteurs.

Virus cancérigènes

Un grand nombre de leucémies et de lymphomes, de sarcomes, les cancers du nasopharynx, les cancers primitifs du foie, les cancers du col de l’utérus – soit environ 5 à 10 % des cancers – sont certainement ou probablement d’origine virale. Tel est le cas du virus HTLV1, à l’origine de certaines leucémies, du virus d’Epstein-Barr (virus EB) pour les lymphomes de Burkitt et les cancers du nasopharynx, du virus de l’hépatite B pour les cancers primitifs du foie, des papillomavirus pour les cancers du col de l’utérus, etc., et même du virus du Sida (HIV), qui bien que non cancérigène en lui-même favorise l’apparition des cancers. En réalité ces virus peuvent être classés en trois groupes distincts :

  1. ceux qui eux-mêmes cancérigènes, apportent à la cellule un ou plusieurs oncogènes. Tel est le cas des rétrovirus, en particulier du virus leucémique HTL1 ;
  2. ceux, qui bien que ne comportant pas d’oncogènes, en s’insérant dans le génome à côté d’un protooncogène cellulaire, l’active et le fait devenir un oncogène. Tel est le cas du virus de l’hépatite B ;
  3. ceux, qui, bien que non mutagènes, participent à l’émergence des cancers en favorisant leur promotion. Tel est le cas du virus du sida, qui en induisant un déficit profond et prolongé du système immunitaire permet à d’autres virus cancérigènes de se multiplier ou à d’autres cancérogènes chimiques, d’intervenir

Le plus souvent, bien que ces différents types de virus participent au processus de cancérisation, ils ne sont pas seuls en cause. D’autres facteurs cancérigènes leur sont associés. En effet, bien que nous n’en ayons pas encore la certitude scientifique, une plus forte contamination par des virus potentiellement cancérigènes est aujourd’hui possible pour deux raisons. Etant donné que notre médecine moderne lutte efficacement contre la plupart des bactéries, il est possible que certains virus, amenés à prendre leur place, en raison d’un phénomène de «pathocénose», soient devenus aujourd’hui plus souvent pathogènes qu’autrefois, et donc qu’en particulier certains virus cancérigènes puissent être plus virulents.
Il ne s’agit là bien sûr encore que d’une hypothèse, mais celle-ci s’avère d’autant plus plausible qu’un deuxième facteur intervient. Parmi les nombreuses molécules chimiques que nous avons dispersées dans l’environnement, un certain nombre d’entre elles sont immunosuppressives, ce qui signifie en clair qu’elles sont susceptibles de favoriser la multiplication des virus dans l’organisme. Cet effet promoteur pourrait donc favoriser les phénomènes de mutagenèse d’origine virale.

Bactéries cancérigènes

Certaines bactéries sont aussi très probablement à l’origine d’autres types de cancers. Tel est le cas de la bactérie helicobacter pylori à l’origine des cancers de l’estomac ; probablement aussi des bactéries saprophytes, existant naturellement dans le gros intestin et dont on a pu montrer qu’elles étaient capables de convertir les nitrates en nitrites, nitrosamines et nitrosamides mutagènes.

Rayonnements ionisants

Les rayonnements sont à l’origine d’environ 10% des cancers. Dans le cas des rayonnements ionisants, il est évident qu’à la radioactivité naturelle est venue s’ajouter depuis la dernière guerre, celle que nous avons artificiellement induite et que de façon globale la radioactivité est probablement aujourd’hui croissante dans le monde. Même si nous devons encore récolter des données, il est en effet scientifiquement impensable que les 500 ou 600 explosions nucléaires que nous avons réalisées n’aient pas et n’auront pas de traduction épidémiologique, compte tenu de la demi-vie prolongée de certains des éléments radioactifs concernés, de leur dissémination à grande distance de leur point d’émergence et de leur effet mutagène à faible dose.

Rayonnements non ionisants

Il est certain que les ultraviolets (UV) sont des cancérigènes mutagènes et qu’ils sont à l’origine de cancers de la peau. En ce qui les concerne, deux hypothèses non exclusives l’une de l’autre coexistent aujourd’hui : l’exposition solaire trop fréquente sur les lieux de vacances et d’autre part, la raréfaction de la couche d’ozone stratosphérique, dont l’action est de filtrer les UV solaires, en augmente la quantité reçue par la peau.
Les Radiations Electromagnétiques Pulsées (REMP) à basse fréquence posent un problème spécifique. Bien qu’il ne soit pas encore définitivement prouvé qu’elles soient cancérigènes, il est néanmoins très probable qu’elles sont à l’origine de leucémies aiguës chez l’enfant, de cancers du sein chez la femme jeune, de mélanomes et de tumeurs cérébrales. C’est ce qu’indiquent plusieurs études épidémiologiques récentes. Les REMP, ont in vitro un effet « clastogénique », c’est-à-dire qu’ils cassent certains chromosomes, (l’effet pulsé des REMP serait ici en cause) et en outre perturberaient les systèmes de réparation cellulaire. Ils seraient donc indirectement mutagènes, bien qu’un effet promoteur soit aussi possible, en raison de leur rôle immunosuppresseur. En réalité les REMP modifieraient par des mécanismes épigénétiques les nombreux constituants cellulaires, dont la membrane cytoplasmique et le glycocalyx . En outre, ils n’agiraient pas seuls. En perturbant les réparases cellulaires, ils favoriseraient l’action de certains autres facteurs mutagènes. C’est tout au moins ce que semble indiquer une étude réalisée récemment en Suède, où de tels champs électromagnétiques en association aux UV solaires, serait en particulier incriminés pour expliquer l’incidence croissante des mélanomes.

Produits chimiques

Depuis ces cinquante dernières années, plusieurs millions de molécules chimiques ont été dispersées dans l’environnement et environ 100.000 ont été commercialisées sans contrôle toxicologique suffisant. Sur ces 100.000 molécules, moins de 5.000 ont été étudiées pour leur effet sur la santé humaine et seulement quelques centaines pour leurs effets cancérigènes. En effet, la constitution des dossiers d’homologation pour la mise sur le marché des produits chimiques n’a été renforcée en France qu’en 1981, et la liste des produits cancérigènes, telle que la proposent aujourd’hui les organismes internationaux ne tient compte que des molécules étudiées. Un énorme retard a dont été accumulé, faute de considérations scientifiques suffisantes et d’une adaptation en conséquence de la législation.
En outre aucun des produits référencés comme cancérigènes par les organismes internationaux n’est distingué selon leur effet mutagène, promoteur ou cocarcinogène. Ces propriétés étant confondues, on ne sait pas au juste, comment les différentes molécules agissent et interfèrent les unes avec les autres pour donner un cancer.
Cependant, ne pas connaître avec certitude l’effet mutagène ou autre de ces différentes molécules ne signifie pas qu’il n’existe pas. Et c’est là que réside l’énorme problème actuel de santé publique. Pourtant, compte tenu des données disponibles, il est clairement établi que nombre de ces molécules ou produits sont mutagènes :

  • certains d’entre eux, tels différents composés organiques volatiles (COV) : HAP, benzène, chlorure de vinyle monomère (CVM), formaldéhyde, contaminent l’organisme par voie respiratoire ;
  • d’autres substances tels les nitrates, nitrosamines et nitrosamides, pesticides organochlorés, les dérivés azoiques, les dioxines etc. le contaminent par voie alimentaire ;
  • en outre, d’autres substances, tels certains pesticides, en raison de leurs propriétés oestrogéniques ou antiandrogéniques agissent aussi en tant que promoteurs ;
  • enfin de nombreux métaux lourds (le plomb, le chrome, le nickel, le cadmium etc.) administrés à dose supraphysiologique agissent en tant que mutagènes, promoteurs ou cocarcinogènes (voir le tableau ci-dessous).

Aujourd’hui, de très nombreuses études toxicologiques et épidémiologiques apportent des preuves convaincantes que l’ensemble de ces produits sont cancérigènes chez l’homme et que ce dernier, y compris le foetus lors de la grossesse et l’enfant, y est exposé de façon multiple, malgré les mesures de protection actuelles.

C’est ce que soulignent de nombreuses études de « biomonitoring », dosant ces substances dans le sang d’adultes volontaires ou d’enfants à la naissance, dont en particulier celle de l’ONG WWF. Ainsi sur les 78 produits chimiques testés chez 155 adultes volontaires, 70 (90 %) y sont retrouvés, qu’il s’agisse de pesticides organochlorés, de PCB* ou de PBDE*, tous les sujets testés étant contaminés par un nombre variable de ces polluants à des taux élevés. C’est d’ailleurs ce qu’ont pu constater les députés européens volontaires pour de tels tests.

Bien sûr, l’étude réalisée par WWF n’apporte pas la preuve scientifique que tous les sujets pollués sont ou seront candidats au cancer, mais il est par ailleurs clair qu’un nombre croissant d’études toxicologiques chez l’animal et épidémiologiques montrent l’existence d’un lien entre une telle pollution et l’apparition de certains cancers chez l’adulte (sein, prostate, testicule) et chez l’enfant (leucémies, tumeurs cérébrales).

Tous les produits chimiques précédemment envisagés sont en outre classés comme cancérigènes certains ou probables chez l’homme par les organismes internationaux, ce qui conduit à considérer que la pollution chimique est à l’origine d’un nombre de cancers de façon plus importante qu’il est classique de le dire.

Les différents facteurs de cancérisation liés au mode de vie et à l’environnement :

HAP : Hydrocarbures aromatiques polycycliques, RA : Radioactivité, UV : Ultraviolet, PCB : Polychlorobiphényls

1 – Contient des HAP, des nitrosamines (mutagènes) et des métaux lourds (cocarcinogènes).
2 – Liés au surpoids ou à l’obésité.
3 – Véhiculé par des fines particules carbonées (poussières).
4 – Fibres plutôt que poussières, vectrices d’oxydes ferreux mutagènes.
5 – Les pesticides organochlorés et les dioxines agissent généralement en tant que perturbateurs endocriniens ou immunosupppresseurs mais certains d’entre eux sont aussi mutagènes, car génotoxiques.
6 – Plomb, chrome, nickel, cadmium. Certains agiraient aussi par un effet mutagène direct.

Pour en savoir plus :
Belpomme D., Irigaray P., Hardell L. Electromagnetic fields as cancer-causing agents. Environ. Research, 107 (2008) 289–290.
Irigaray P., Newby J.A., Clapp R., Hardell L., Howard V., Montagnier L., Epstein S.S., Belpomme D. Lifestyle-related factors and environmental agents causing cancer: An overview. Biomed Pharmacother. 2007 Dec;61(10):640-658.
Irigaray P., Newby J.A., Lacomme S., BelpommeD. Overweight/obesity and cancer genesis: More than a biological link. Biomed Pharmacother. 2007 Dec;61(10):665-678.
Belpomme D., Irigaray P., Hardell L., Montagnier L., Epstein S.S., Clapp R., Sasco A.J. The multitude and diversity of exogenous carcinogens. Environ. Research, 105 (2007) 414–429. Belpomme D., Irigaray P., Newby J.A., Howard V., Clapp R., Sasco A.J., Hardell L. The growing incidence of cancer: role of lifestyle and screening detection. Int J Oncol. 2007, 30, 1037-
1049.

11ème argument ! l’augmentation du nombre des cancers chez les animaux

Les cancers concernent exclusivement les métazoaires. Bien que prédominant chez l’homme, ils ne leur sont pas spécifiques, puisque pouvant survenir aussi chez les animaux. Chez eux, la maladie n’est pas restreinte à une espèce particulière et apparaît naturellement chez de nombreux vertébrés (les rongeurs, les animaux domestiques ou d’élevage) et même chez les vertébrés à sang froid. Il semble que les cancers soient plus rares chez les invertébrés en particulier chez les organismes inférieurs d’origine marine. A tel point que certains d’entre eux – ironie de la science, si on se réfère à l’image du crabe et de l’écrevisse – en seraient
exempts, peut-être en raison de systèmes moléculaires de protection spécifiques.

Or il semble établi, bien que nous manquons encore de données épidémiologiques précises, que le nombre de cancers chez les animaux (en particulier chez les animaux domestiques) est en augmentation depuis ces dernières années. En tous cas, l’apparition de cancers chez les poissons, inconnue il y a 50 ans, est aujourd’hui indiscutablement prouvée.

On ne peut à l’évidence incriminer ici des facteurs liés au mode de vie, la seule explication possible étant l’existence de facteurs environnementaux, mutagènes et promoteurs.

12ème argument ! la pollution est la cause commune de nombreuses autres maladies

On pourrait se demander si le rôle de l’environnement dans la genèse des cancers est une
exception par rapport aux autres maladies. La réponse ne fait pas de doute.
Un très grand nombre de nos maladies sont aujourd’hui créées par l’homme. Tel est le cas :

  • des allergies, qui atteignent maintenant 20% de la population française, soit plus de 12 millions de nos concitoyens ;
  • de l’asthme, qui selon les données officielles de la Commission européenne, affecte aujourd’hui un enfant sur 7 en Europe ;
  • des malformations congénitales de l’appareil reproducteur, chez le petit garçon ou la petite fille, dont les premières victimes sont les enfants d’agriculteurs ;
  • de la stérilité croissante en Europe : 15% des couples sont actuellement infertiles, cette infertilité croissante ne pouvant pas être expliquée uniquement par le mode de vie, en particulier par l’utilisation de la pilule, puisqu’elle concerne une fois sur deux les hommes, soit 7,5 % des couples. En effet, d’autres facteurs interviennent, tels que la contamination par les pesticides et autres molécules chimiques (phtalates, PCB etc…) et probablement par un effet toxique des REMP. Enfin tel est le cas de l’apparition de certaines maladies dégénératives du système nerveux central chez les sujets jeunes, en particulier de la maladie de Parkinson etc.

En outre, nous avons démontré que l’obésité pouvait être pour partie induite par le benzo[a]pyrène, un polluant universel, et il vient d’être établi que même le diabète de type II avait pour origine certains polluants.
Or toutes ces maladies ont aujourd’hui pour cause commune la pollution de notre environnement par différents facteurs :

  • poussières atmosphériques qui agrègent des COV ou autres molécules non volatiles mutagènes ou promotrices ou des allergènes naturels ;
  • polluants organiques persistants (POP) s’accumulant dans le tissu graisseux de l’organisme et passant la barrière placentaire ;
  • contaminants ou additifs alimentaires consommés dès la plus petite enfance ;
  • pesticides ou autres perturbateurs endocriniens ou du système nerveux central etc..

Ainsi l’augmentation actuelle du nombre de cancers, comme celle des autres maladies, est un signe d’alarme essentiel, témoignant du retentissement de la pollution sur notre état de santé.

* Le calcul est basé sur les données épidémiologiques de l’Institut National de Veille Sanitaire et sur le risque attribuable au tabac estimé pour l’ensemble des cancers. Selon C. Hill, la fraction attribuable au tabagisme était en 1999 de 36% pour les hommes et de 4% pour les femmes, pour la mortalité. Les chercheurs de l’ARTAC l’utilisent de même pour l’incidence, en admettant qu’elle est probablement majorée, en raison de la mortalité en général plus élevée des cancers liés au tabac (bronches, ORL, œsophage, vessie). Ainsi les chiffres extrapolés pour l’incidence des cancers liés au tabac sont-il très probablement surestimés.
Pour plus d’informations, consulter le livre du Pr Belpomme « Guérir du cancer ou s’en protégeer »,Fayard, 2005.